2018 année Leconte de Lisle : poèmes
Retranscription textuelle de l'affiche (le poème) :
Comme le flot des mers ondulant vers les plages,
Ô bois, vous déroulez, pleins d'arome et de nids,
Dans l'air splendide et bleu, vos houles de feuillages ;
Vous êtes toujours vieux et toujours rajeunis.
Le temps a respecté, rois aux longues années,
Vos grands fronts couronnés de lianes d'argent ;
Nul pied ne foulera vos feuilles non fanées :
Vous verrez passer l'homme et le monde changeant.
Vous inclinez d'en haut, au penchant des ravines,
Vos rameaux lents et lourds qu'ont brûlés les éclairs ;
Qu'il est doux, le repos de vos ombres divines,
Aux soupirs de la brise, aux chansons des flots clairs !
Le soleil de midi fait palpiter vos sèves ;
Vous siégez, revêtus de sa pourpre, et sans voix ;
Mais la nuit, épanchant la rosée et les rêves,
Apaise et fait chanter les âmes et les bois.
Par delà les verdeurs des zones maternelles
Où vous poussez d'un jet vos troncs inébranlés,
Seules, plus près du ciel, les neiges éternelles
Couvrent de leurs plis blancs les pics immaculés.
Ô bois natals, j'errais sous vos larges ramures
L'aube aux flancs noirs des monts marchait d'un pied vermeil ;
La mer avec lenteur éveillait ses murmures,
Et de tout oeil vivant fuyait le doux sommeil.
Au bord des nids, ouvrant ses ailes longtemps closes,
L'oiseau disait le jour avec un chant plus frais
Que la source agitant les verts buissons de roses,
Que le rire amoureux du vent dans les forêts.
Les abeilles sortaient des ruches naturelles
Et par essaims vibraient au soleil matinal ;
Et, livrant le trésor de leurs corolles frêles,
Chaque fleur répandait sa goutte de cristal.
Et le ciel descendait dans les claires rosées
Dont la montagne bleue au loin étincelait ;
Un mol encens fumait des plantes arrosées
Vers la sainte nature à qui mon coeur parlait.
Au fond des bois baignés d'une vapeur céleste,
Il était une eau vive où rien ne remuait ;
Quelques joncs verts, gardiens de la fontaine agreste,
S'y penchaient au hasard en un groupe muet.
Les larges nénuphars, les lianes errantes,
Blancs archipels, flottaient enlacés sur les eaux,
Et dans leurs profondeurs vives et transparentes
Brillait un autre ciel où nageaient les oiseaux.
Ô fraîcheur des forêts, sérénité première,
Ô vents qui caressiez les feuillages chanteurs,
Fontaine aux flots heureux où jouait la lumière,
Éden épanoui sur les vertes hauteurs !
Salut, ô douce paix, et vous, pures haleines,
Et vous qui descendiez du ciel et des rameaux,
Repos du coeur, oubli de la joie et des peines !
Salut ! ô sanctuaire interdit à nos maux !
Et, sous le dôme épais de la forêt profonde,
Aux réduits du lac bleu dans les bois épanché,
Dormait, enveloppé du suaire de l'onde,
Un mort, les yeux au ciel, sur le sable couché.
Il ne sommeillait pas, calme comme Ophélie,
Et souriant comme elle, et les bras sur le sein ;
Il était de ces morts que bientôt on oublie ;
Pâle et triste, il songeait au fond du clair bassin.
La tête au dur regard reposait sur la pierre ;
Aux replis de la joue où le sable brillait,
On eût dit que des pleurs tombaient de la paupière
Et que le coeur encor par instants tressaillait.
Sur les lèvres errait la sombre inquiétude.
Immobile, attentif, il semblait écouter
Si quelque pas humain, troublant la solitude,
De son suprême asile allait le rejeter.
Jeune homme, qui choisis pour ta couche azurée
La fontaine des bois aux flots silencieux,
Nul ne sait la liqueur qui te fut mesurée
Au calice éternel des esprits soucieux.
De quelles passions la jeunesse assaillie
Vint-elle ici chercher le repos dans la mort ?
Ton âme à son départ ne fut pas recueillie,
Et la vie a laissé sur ton front un remord.
Pourquoi jusqu'au tombeau cette tristesse amère ?
Ce coeur s'est-il brisé pour avoir trop aimé ?
La blanche illusion, l'espérance éphémère
En s'envolant au ciel l'ont-elles vu fermé ?
Tu n'es pas né sans doute au bord des mers dorées,
Et tu n'as pas grandi sous les divins palmiers ;
Mais l'avare soleil des lointaines contrées
N'a pas mûri la fleur de tes songes premiers.
À l'heure où de ton sein la flamme fut ravie,
Ô jeune homme qui vins dormir en ces beaux lieux,
Une image divine et toujours poursuivie,
Un ciel mélancolique ont passé dans tes yeux.
Si ton âme ici-bas n'a point brisé sa chaîne,
Si la source au flot pur n'a point lavé tes pleurs,
Si tu ne peux partir pour l'étoile prochaine,
Reste, épuise la vie et tes chères douleurs !
Puis, ô pâle étranger, dans ta fosse bleuâtre,
Libre des maux soufferts et d'une ombre voilé,
Que la nature au moins ne te soit point marâtre !
Repose entre ses bras, paisible et consolé.
Tel je songeais. Les bois, sous leur ombre odorante,
Épanchant un concert que rien ne peut tarir,
Sans m'écouter, berçaient leur gloire indifférente,
Ignorant que l'on souffre et qu'on puisse en mourir.
La fontaine limpide, en sa splendeur native,
Réfléchissait toujours les cieux de flamme emplis,
Et sur ce triste front nulle haleine plaintive
De flots riants et purs ne vint rider les plis.
Sur les blancs nénuphars l'oiseau ployant ses ailes
Buvait de son bec rose en ce bassin charmant
Et, sans penser aux morts, tout couvert d'étincelles,
Volait sécher sa plume au tiède firmament.
La nature se rit des souffrances humaines ;
Ne contemplant jamais que sa propre grandeur,
Elle dispense à tous ses forces souveraines
Et garde pour sa part le calme et la splendeur.
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La légende du poète est vivante. La Bibliothèque départementale de La Réunion conserve plusieurs centaines de titres et d'articles et recense plus d'une vingtaine d'éditeurs réunionnais dont les ouvrages continuent de façonner le mythe.
Le lyrisme du poète a encore sa place parmi nous. Les préceptes universels de sa poésie sont sans cesse illuminés par des références limpides à notre environnement et humanité.
Les saveurs de l'Eden réunionnais transitent dans ses rimes et les auteurs s'en inspirent abondamment.
L'oeuvre littéraire de Leconte de Lisle a largement été diffusée à La Réunion, chaque moment de célébration d'un élément de son existence étant un prétexte, ou un devoir à honorer sa mémoire.
Aujourd'hui l'onomastique le commémore perpétuellement. La Réunion lui a offert une rue dans presque toutes les communes. Ici et ailleurs, des écoles, lycées, espaces culturels, bateaux, monuments, bibliothèques (...) portent son nom.
Les éditions récentes de textes commentés ou rassemblés instinctivement, artistiquement et schématiquement par des auteurs réunionnais sont des hommages à ce patrimoine.
Le rapport de Leconte de Lisle à son île, voire à l'Indiaocéanie dans son ensemble, se conjugue à une production éditoriale soutenue. Il bénéficie de la reconnaissance de tous les acteurs du monde culturel. Les premières véritables maisons d'éditions locales, Cazal et Drouhet, publient les commentaires de son oeuvre.
Puis, dans les années d'après guerre, c'est Hugues de Jouvancourt qui propose un livre d'art aux Éditions de La Tortue, mettant en valeur le poète animalier par la réalisation de magnifiques bois gravés. Le centenaire de sa mort, en 1994, donnera une nouvelle occasion d'éditer un ouvrage, cette fois-ci avec des estampes de paysages en couleurs.
Les générations actuelles publient leurs propres découvertes et analyses de l'oeuvre, et innovent en proposant des pistes inédites souvent liées à certains aspects de l'identité créole : l'Inde, la musique, l'esclavage, et la beauté d'une île qui ne cesse d'être célébrée à l'image du poète. A travers ses missions, la BdR collecte les publications qu'elle enregistre et conserve au titre du dépôt légal pour la postérité.
EXPOSITION LECONTE DE LISLE :
Leconte de Lisle à travers les collections patrimoniales du Département
L'homme de lettres
L'homme de Sciences
L'Auteur vu par ses contemporains
L'amour d'une île, Éden des poètes
Une Légende Réunionnaise
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Les sociétés savantes et les chercheurs s'approprient la vie du personnage et son oeuvre en publiant leurs découvertes. De multiples travaux d'analyse ainsi que plusieurs évènements permettent à Leconte de Lisle de s'inscrire définitivement dans la mémoire collective.
Après la guerre, les travaux de recherches sur les éléments biographiques et bibliographiques du poète regorgent de publications qui précisent à la fois l'histoire du personnage et ouvrent sur l'infinie richesse de son legs.
L'Académie de la Réunion, les Archives départementales, les instituts et facultés, les associations et revues locales s'emparent de la légende et creusent le rapport identitaire que contient une grande portion des écrits du poète.
Les publications recensées nous livrent une appréciation de plus en plus précise de ses écrits, mais aussi de sa vie. Lors de son dernier séjour à Bourbon entre 1843 et 1845, Leconte de Lisle comprend la situation des esclaves et défend leur cause une fois de retour à Paris. Il rejette le joug du colonialisme et publie son fameux conte Sacatove.
Remettant pleinement en question ses croyances, il reste finalement toujours à la recherche de la beauté et de son harmonie, mais aussi de Dieu. Le poète, meurtri par tant d'injustices sociales, trouve refuge dans les grandes civilisations antiques, notamment l'étude des philosophies et des religions de l'Inde.
Son adhésion au mouvement fouriériste, au début de sa carrière, resurgit comme une preuve de son combat pour le droit, la justice et la liberté des hommes.
Ses cendres sont rapatriées en 1977 au Cimetière marin de Saint-Paul. Le Prince des poètes est de retour sur ses terres. Un autre Réunionnais célèbre, Raymond Barre, est alors Premier ministre de la République. Boris Gamaleya et d'autres écrivains se joignent à cet élan visant à reconnaître le lien indéfectible qui unit désormais chaque génération de créoles au poète.
Quelle que soit l'idéologie, l'intellectuel autonomiste et le chantre de la départementalisation s'entendent au moins sur l'importance du personnage dans la culture réunionnaise.
Les textes d'auteurs locaux et nationaux apportent de nouvelles interprétations de la vie et de l'oeuvre du poète créole. La BdR conserve une importante collection de revues et de journaux qui permettent de suivre la construction de l'identité réunionnaise à travers le temps.
EXPOSITION LECONTE DE LISLE :
Sa présence dans l'édition réunionnaise
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Mieux que ses amis George Sand et Baudelaire, Leconte de Lisle inspiré par son île, décrit la Réunion comme un paradis perdu. Les hommes de lettres réunionnais s'emparent alors de son art, l'élevant ainsi au rang de "génie créole".
Dès le début du XXe siècle, les Réunionnais vont créer leur propre légende de l'épopée époustouflante de l'un des leurs.
Les plus célèbres écrivains, poètes et historiens d'hier, et d'aujourd'hui, le lisent puis le suivent. Ils font resplendir son oeuvre impressionnante. D'abord Marius et Ary Leblond, Raphaël Barquissau, et Hippolyte Foucque qui publient des ouvrages et révèlent le caractère réunionnais du poète avec candeur.
Selon les Leblond, l'âme créole de Leconte de Lisle est imprégnée par "son admiration de la poésie hellénique et un mélange qui ne s'est intimement et aisément accompli que parce que le poète s'est plongé dans la nature locale, elle-même issue de l'union harmonieuse d'une beauté indienne et d'une pureté grecque".
Leconte de Lisle vit dans un souvenir antique et exotique de son île, décor parfait pour son imagination métissée et à jamais victime de son exil.
C'est ainsi que l'île de sa jeunesse devient l'Eden éternel et qu'on retrouve les paysages réunionnais dans ses poèmes sur l'Inde, la Grèce, la Perse, la Polynésie...
Leconte de Lisle rassemble dans ses écrits l'infinie beauté de l'île, ce paradis terrestre tant chanté par ses visiteurs au fil des siècles. Il parvient à positionner avec lui, son île, au sommet du Parnasse français.
Leconte de Lisle est sacralisé, installé sur un piédestal. Sa lexicologie et ses textes, une fois juxtaposés à ceux de Parny, Baudelaire, Sand, Lacaussade et Dierx, ancrent définitivement I'lle dans sa réputation unique d'Ile des Poètes.
Le génie se transforme en faire valoir de l'identité réunionnaise.
Le Département conserve plusieurs exemplaires d'ouvrages au sein de son fonds local qui mettent en valeur le legs du poète à son île, ainsi que des pièces manuscrites, dont une lettre destinée à celle qui fut sa dernière muse.
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Reconnu par ses pairs, il est élu à l'Académie française et devient alors comme Victor Hugo, un immortel ! L'oeuvre de Leconte de Lisle ne laisse personne insensible. A sa mort, un grand nombre de publications voit le jour, dévoilant ainsi l'étendue de son talent.
Au fur et à mesure que sa carrière progresse et que la France industrielle impose des transformations majeures à la société, Leconte de Lisle voit croître sa notoriété. Il bénéficie de l'admiration des poètes qui marquent son époque, tels Verlaine et surtout Baudelaire, qui fut son ami.
Devenu bibliothécaire au Sénat, Leconte de Lisle prononce l'éloge de Victor Hugo, au nom des poètes, lors des gigantesques funérailles du célèbre écrivain à Paris.
Avec l'école parnassienne, c'est l'Histoire, la peinture et même la musique qui s'invitent autrement puisque un grand nombre d'artistes interprètent ses vers dans leur art.
Au décès du poète en 1894, une pléthore d'articles et d'ouvrages dévoile les inédits, lettres, anecdotes, et souvenirs montrant l'intimité d'un grand humaniste. Sa correspondance, sa vie, son oeuvre ne cesseront alors d'être décortiquées et ainsi valorisées.
Ecologiste d'avant-garde, il veut distinguer l'homme de la nature dans leur rapport au sacré. Sa vision progressiste a l'avantage de centrer la temporalité de la vie de l'homme, malgré lui.
Comme tout homme qui a traversé le XIXe siècle, Leconte de Lisle a connu des changements de régimes politiques, allant de la dernière période monarchique à la seconde et troisième république, en passant par le second empire, des guerres et des révolutions.
Républicain frustré, il est un acteur politique qui prend position pour l'abolition de l'esclavage. Le poète ira porter la pétition de jeunes créoles de Paris souhaitant prendre le contre pied des positions locales dominées par leur famille, les colons.
Les premières études fleurissent sur la tombe du poète et encensent une oeuvre enivrante. Leconte de Lisle ne suscite plus les polémiques qu'il souleva parfois de son vivant et dont il devait se soustraire en publiant des opuscules d'éducation populaire, notamment son "Catéchisme Républicain" précurseur de la laïcité.
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"Unir l'Art à la Science, voici la véritable fonction du poète". Leconte de Lisle s'impose rapidement comme un spécialiste des grandes civilisations anciennes, les remettant au goût du jour grâce à une traduction innovante et précise de grands classiques de la littérature.
Adoptant une attitude positiviste dans une seconde moitié du XIXe siècle qui sera celui des sciences, Leconte de Lisle est un véritable chercheur du "beau et du bien qui sont aussi le vrai".
Le poète apprend la botanique, la biologie et autres sciences naturelles auprès de scientifiques et d'érudits de son temps, notamment ceux ayant voyagé à Bourbon et participé aux grandes circumnavigations de son époque.
Fasciné par la divine nature comme le montre un nombre impressionnant de ses strophes, Leconte de Lisle croit en l'égalité des êtres vivants sur terre.
À force d'analyser les fondamentaux de la littérature et de les traduire, il impose son talent unique. Sa vision retranscrit à merveille l'épopée divine de nombreux héros mythologiques.
En s'appropriant les subtilités du sens métrique dans l'édition de ces oeuvres complexes, Leconte de Lisle développe une prosodique et une rythmique quasi révolutionnaire. La qualité de sa contribution aux sciences linguistiques ajoute à sa réputation au sein du monde culturel et scientifique.
Ses traductions permettent une meilleure connaissance de la pensée philosophique occidentale, qui doit énormément aux mythologies hellénistes et indiennes.
Leconte de Lisle a savamment su retranscrire l'origine même du verbe tel que mis en scène par les prophètes et poètes de l'Antiquité.
De l'Inde, il cultive le sens dramatique de l'illusion universelle grâce à sa grande maîtrise de la pensée hindoue et de sa spiritualité.
Son oeuvre suit le progrès des idées de son temps. C'est dans cette période faste, où l'industrialisation accélère les mutations sociétales, que s'inscrit le travail colossal du Poète — Traducteur, qui saura mettre en valeur le caractère sacré et éternel des textes anciens du monde entier.
Outre les traductions en éditions originales de Homère, Hésiode, Sophocle, Eschyle ou Euripide, la Bibliothèque départementale conserve plusieurs livres d'art illustrant la vie et l'oeuvre de Leconte de Lisle.
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Sa vocation littéraire débute par l'écriture de contes en prose, de poésies et d'articles dans des journaux nationaux. Très rapidement, il publie des recueils qui font sa célébrité.
Ses tous premiers écrits font l'éloge d'une muse et annoncent la considération vénérée que porte le Saint-Paulois à son île dans au moins une trentaine des deux cents poèmes qui contribuent à sa renommée.
Le décor de l'exotisme sacré qu'incarne l'Eden réunionnais, maintes fois chanté depuis, est planté.
Si la poésie s'éveilla en lui à l'âge de 15 ans : "c'est tout d'abord grâce au hasard d'être né dans un pays merveilleusement beau et à moitié sauvage, riche de végétations étranges, sous un ciel éblouissant. C'est surtout grâce à cet éternel "premier amour", fait de désirs vagues et de timidités délicieuses ...".
Leconte de Lisle crée trois principales oeuvres : Poèmes Antiques, Poèmes Barbares, et Poèmes Tragiques, auxquelles il faut rajouter le recueil Derniers Poèmes, publié un an après son décès, ainsi que les fameuses éditions Poèmes et Poésies, et Poésies Complètes.
Ses vers ont marqué l'histoire de la littérature française, incitant le lecteur à la contemplation de rimes composées avec finesse. Dans son art, qu'il considère proche du divin, le poète consacre, à nombre de légendes antiques, un décor d'un lyrisme puissant, à la fois stoïque et foudroyant.
S'inspirant de la vision moderne de l'exotisme chanté par Victor Hugo mais aussi de celles de Bernardin de St Pierre, Parny, Sand et Lacaussade, Leconte de Lisle saura mieux que quiconque prouver que "l'île est une valeur littéraire que l'on peut utiliser" !
Adepte de la "vraie" poésie, il fait briller une perle du Sud, La Réunion.
Le Département conserve plusieurs éditions originales des oeuvres de Leconte de Lisle, dont un corpus dédicacé à Léon Dierx et un rare ensemble manuscrit et tapuscrit du poème Le Dernier Dieu. Vivant peu de son art et oublié des siens, Leconte de Lisle cède ses droits à Alphonse Lemerre, principal imprimeur de l'oeuvre parnassienne durant plusieurs décennies.
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Retranscription textuelle de l'affiche (le poème) :
L’ORBE d’or du soleil tombé des cieux sans bornes
S’enfonce avec lenteur dans l’immobile mer,
Et pour suprême adieu baigne d’un rose éclair
Le givre qui pétille à la cime des Mornes.
En un mélancolique et languissant soupir,
Le vent des hauts, le long des ravins emplis d’ombres,
Agite doucement les tamariniers sombres
Où les oiseaux siffleurs viennent de s’assoupir.
Parmi les caféiers et les cannes mûries,
Les effluves du sol, comme d’un encensoir,
S’exhalent en mêlant dans le souffle du soir
À l’arome des bois l’odeur des sucreries.
Une étoile jaillit du bleu noir de la nuit,
Toute vive, et palpite en sa blancheur de perle ;
Puis la mer des soleils et des mondes déferle
Et flambe sur les flots que sa gloire éblouit.
Et l’âme, qui contemple, et soi-même s’oublie
Dans la splendide paix du silence divin,
Sans regrets ni désirs, sachant que tout est vain,
En un rêve éternel s’abîme ensevelie.
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Depuis la nuit des temps, la poésie est un art majeur, une discipline artistique particulièrement distinguée et populaire.
Chef de file de l’école poétique des Parnassiens, Charles-Marie-René Leconte de Lisle a voué sa vie à composer des vers somptueusement millimétrés, empreints d’un esthétisme plus que remarquable.
Ses poèmes ont été enseignés et appris par la plupart des générations francophones.
Des dizaines d’ouvrages, des centaines de livres, des milliers de commentaires ont été imprimés et tout, ou presque, a été écrit sur le Prince des poètes.
Le sens épique de sa poésie révèle le beau de l’expression humaine, la beauté de la nature, et le sens du sacré.
L’œuvre de Leconte de Lisle est universelle et permet au lecteur assidu de voyager de l’Antiquité aux Temps Modernes.
La Bibliothèque départementale de La Réunion (BdR) se devait de proposer une exposition soulignant l’année du bicentenaire de naissance de l’écrivain à travers les livres, accomplissant ainsi sa mission de valorisation du patrimoine réunionnais.
Connaître son histoire est primordial, savoir un poème une fierté. La poésie est un art vivant, qui transgresse les générations, se peint et se chante.
Leconte de Lisle, patrimoine de tous les Réunionnais, d’hier et d’aujourd’hui, fait partie de notre mémoire collective, mais pour quelles raisons ?
La vie, l’œuvre et la légende de Leconte de Lisle nous interrogent sur le lien qui unit le Réunionnais à son île et à sa nature, à son pays et à sa culture, notamment lorsqu’il en connait l’exil.
Cette exposition est le reflet de l’action du Conseil départemental en 2018 pour célébrer le bicentenaire d’un post romantique idéaliste, intime sculpteur de l’âme créole et authentique témoin de son temps.
Les pièces présentées tentent de retracer le legs précieux d’un écrivain à son île à travers les documents les plus emblématiques conservés au sein des collections départementales qui dévoilent le génie prolifique et universel de ce grand auteur.
Pièce phare des collections patrimoniales, la traduction par Leconte de Lisle de “l’Odyssée”, dont le Département a acquis le manuscrit complet des 24 Rhapsodies en 1957, est la version la plus éditée dans le monde encore aujourd’hui !
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Natif de Saint-Paul de La Réunion où la poésie s'éveilla en lui dès l'âge de 15 ans, grâce selon ses propres mots « au hasard d'être né dans un pays merveilleusement beau » et à son « éternel premier amour », Leconte de Lisle a écrit l'essentiel de son œuvre en Bretagne et surtout à Paris.
Eminence incontestée du patrimoine littéraire de son île, Leconte de Lisle, chef de file des Parnassiens qui a célébré « l'art pour l'art », chantre des civilisations exotiques et des cosmogonies antiques, est aussi une référence de la poésie française et du monde.
Pour Hippolyte Foucque, son compatriote réunionnais, critique littéraire, « il fut en poésie le représentant de tout un monument de l'évolution de la pensée française, il a exprimé les idées de son temps, et quelques-unes des idées éternelles de l'Humanité avec un tel souci d'art que son oeuvre durera tant que subsistera chez les Hommes le goût des belles formes ».
2018 célèbre le bicentenaire de sa naissance, en même temps que les 170 ans de l'abolition de l'esclavage dont il a été un avocat engagé, comme il a été un défenseur précoce de la laïcité.
Pour rendre hommage à l'oeuvre de Leconte de Lisle, le Conseil départemental de La Réunion a choisi de lui consacrer une année commémorative. Une année entière pour faire rayonner sa poésie et la partager, sur le territoire insulaire et au-delà. Sa direction culturelle en a assuré la conception et l'animation, tandis que sa Bibliothèque - dont la vocation est de conserver, d'enrichir et de valoriser le patrimoine littéraire de l'île - a été chargée du commissariat d'une exposition rassemblant les collections patrimoniales du Département se rapportant à l'oeuvre du poète et à sa légende.
A la faveur d'une collaboration fructueuse avec la Haute Assemblée, dans le lieu même où l'illustre Réunionnais a exercé des fonctions de bibliothécaire pendant plus de 20 ans, ce sont les pièces les plus remarquables de cette exposition qu'il est donné ici de découvrir.
Que messieurs les Questeurs du Sénat qui ont permis cet accueil, sur la proposition de Madame Nassimah Dindar, Sénatrice de La Réunion, en soient vivement remerciés, pour Charles-Marie-René Leconte de Lisle et pour cet art majeur et vivant qu'est la poésie.
Cyrille MELCHIOR, Président du Conseil départemental de La Réunion
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Retranscription textuelle de l'affiche (le poème) :
Le Piton des Neiges
La lumière s’éveille à l’orient du monde.
Elle s’épanouit en gerbes, elle inonde,
Dans la limpidité transparente de l’air,
Le givre des hauts pics d’un pétillant éclair.
Au loin, la mer immense et concave se mêle
A l’espace infini d’un bleu léger comme elle,
Où s’enlaçant l’un l’autre en leurs cours diligents,
Sinueux et pareils à des fleuves d’argent,
Les longs courants du large, aux sources inconnues,
Etincellent et vont se perdre dans les nues ;
Tandis qu’à l’Occident où la brume s’enfuit,
Comme un pleur échappé des yeux d’or de la Nuit,
Une étoile, là-bas, tombe dans l’étendue
Et palpite un moment sur les flots suspendue.
Mais sur le vieux Piton, roi des monts ses vassaux
Hôte du ciel, seigneur géant des grandes Eaux,
Qui dresse, dédaigneux du fardeau des années,
Hors du gouffre natal ses parois décharnées,
Un silence sacré s’épand de l’aube en fleur.
Jamais le Pic glacé n’entend l’oiseau siffleur,
Ni le vent du matin empli d’odeurs divines
Qui rit dans les palmiers et les fraîches ravines,
Ni parmi le corail des antiques récifs,
Le murmure rêveur et lent des flots pensifs,
Ni les vagues échos de la rumeur des hommes.
Il ignore la vie et le peu que nous sommes,
Et calme spectateur de l’éternel réveil,
Drapé de neige rose, il attend le Soleil.
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